Qu'est devenu le théâtre populaire ?

Laurent Rogero, fondateur du Groupe Anamorphose ne mâche pas ses mots à propos de la raréfaction du théâtre populaire. Cela dans une tribune, intitulée "qu'est devenu le théâtre populaire et publiée sur le site du groupe.
Ce n'est pas sans rapport semble-t-il avec la difficulté à intéresser le milieu théâtral aux réalités des mondes du travail et de l'économie, aussi prégnantes soient-elles dans nos sociétés.
Ce billet où il s'interrogeait en 2008 sur ce qu'il est devenu ne mérite -t-il pas ainsi réflexion ici, même s'il s'agit d'un sujet assez souvent débattu ?
Car le point de vue approfondi qu'il exprime sur les causes de cette raréfaction va me semble-t-il un peu au-delà des propos habituels. En résumé:
- Le théâtre populaire est une affaire de foi, et cette foi s’est perdue chez l’artiste, le politique et le peuple.
- Artistes: de plus en plus d’auteurs de théâtre, de plus en plus de théâtre édité, mais personne dans la rue ne saurait citer un auteur dramatique vivant; de plus en plus de metteurs en scène, de plus en plus d’acteurs, et de moins en moins de troupes. [Or]" la troupe est une nécessaire condition du théâtre populaire".
- Élus: la plupart sont plus soucieux de faire du monde que de rassembler le peuple. L’animation culturelle amène le consensus alors que le rassemblement du peuple pourrait faire débat..
La majorité des opérateurs culturels envisagent les artistes comme des producteurs et les spectateurs comme des consommateurs...[Ils] renient ainsi le théâtre en tant que lien social, en tant que moyen d’émancipation des citoyens, et condamnent toute possibilité d’existence d’un théâtre populaire.
- Public: il ne cherche pas à se reconstituer comme peuple....la majorité des publics de théâtre contemporain ne demandent pas au théâtre de représenter la société....Les publics, dans leur majorité, demandent aux différents théâtres de les divertir en leur représentant le monde de la façon particulière dont ils aiment à se le représenter.

Analyse sans concession à l'issue de laquelle l'auteur reconnait cependant ne considérer là que les comportements majoritaires et conclut que si le théâtre populaire est mort, il renaîtra de ses cendres.
Car "le jour viendra où une foule de gens insatisfaits d’un mode de vie taillé sur mesure... éprouveront le besoin de se mesurer à la société entière. Sur scène, les artistes qu’ils encourageront donneront la pleine mesure, la vraie démesure de cette société. Les réactions alors seront vives. On pourra reparler de spectacle vivant."