"Après la pluie" de Sergei Belbel à la Comédie Française

Il s'agit d'une pièce qui se déroule sur la terrasse de la tour d'une grande entreprise. Elle nous propulse donc de façon originale dans l’univers de l’entreprise, par le biais de discussions - exacerbées après la pluie - entre collègues sur le lieu même qui symbolise le pouvoir: la tour (un peu comme dans Building de Léonore Confino) . Le toit de l’immeuble est assailli pendant une heure et demie par huit de ses employés qui viennent fumer une cigarette: un programmeur informaticien, un chef administratif, une directrice exécutive, quatre secrétaires et un coursier.
Sergi Belbel a reçu le Molière de la meilleure pièce comique avec cette pièce. A voir en ce moment à la Comédie Française.

Ce qu'en dit la page facebook "La Comédie-Française en toutes lettres"

Sauter ou pas ?…petites scènes de genre du monde du travail…
"APRES LA PLUIE" de Sergi Belbel dans une Mise en scène Lilo Baur qui nous avait déjà étonnés au Français par son superbe et original travail sur "La Maison de Bernarda Alba" de Lorca et sur "La tête des autres" de Marcel Aymé au Français, nous revient ici avec bonheur avec une pièce très contemporaine de l'auteur catalan Sergi Belbel, qui fut récompensé par le "Molière de la meilleure pièce comique". 
Sur la terrasse d'un building de bureaux, bâtiment anonyme parmi des milliers similaires qui se dressent dans le ciel d'une mégapole semblable à toutes les autres, des employés savourent le plaisir devenu très illicite de… fumer une cigarette. L'action semble suspendue dans l'attente d'une pluie qui nettoierait la poussière qui ensevelit les choses et les gens. Des hélicoptères passent générateurs d'angoisse et parfois s'écrasent (sinistre prémonition ?)….On oscille sans cesse entre une sorte de quotidien caricatural de personnages névrosés et une vision pas très lointaine d'un scénario de science fiction qui viendrait frôler notre triste réalité contemporaine. Cette tour, symbolise le pouvoir. Celui qui se conquiert, celui que l'on peut perdre aussi vite dans un total arbitraire. Tous les personnages arrivent au terme d'une évolution affective, professionnelle ou existentielle. La terrasse, plongeoir au-dessus du vide est une sorte de confessionnal ou de divan, où tombent les masques de l'hypocrisie et des positions hiérarchiques. C'est une comédie tragique, drôle, grinçante et parfaitement déjantée où parfois, aussi, les personnages rêvent de sauter et surtout de balancer dans le vide ces petits chefs, qui leur pourrissent la vie. Les dialogues sont vifs et efficaces et le texte présente aussi quelques belles tirades plus "littéraires" où on parle d'humain, d'humanité, de grande solitude. 
Quand aux acteurs, ils jouent aussi très bien de cet étrange et original décor vertigineux. Avec Véronique Vella "secrétaire "chatun", Cécile Brune éblouissante "directrice" très "exécutive", Alexandre Pavloff "chef administratif", Clotilde de Bayser, "secrétaire rousse", Anna Cervinka, "secrétaire blonde" Nazim Boudjenah, "coursier", Sébastien Pouderoux, "informaticien" et Rébecca Marder, tendre"secrétaire brune"…
Est-ce un hasard si les personnages ne portent de noms que ceux de leurs fonctions ? Claudine Huglo

Au Vieux-Colombier du 29 novembre au 7 janvier 2018.
Scénographie : Andrew D. Edwards, Costumes : Agnès Falque, Lumières : Fabrice Kebour, Musique originale : Mich Ochowiak, Maquillages et coiffures : Catherine Bloquère, Collaboration artistique : Aoife Hinds.
(Photos Claudine Huglo)